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"Ma feuille de route, c’est la préservation et la création d’emplois", (Jalil Benabdillah, Région Occitanie)

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"Ma feuille de route, c’est la préservation et la création d’emplois", (Jalil Benabdillah, Région Occitanie)
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Le vice-président en charge de l'économie, de l'emploi, de l'innovation et de la réindustrialisation pour la Région Occitanie est, depuis le 2 juillet dernier, un chef d'entreprise. Fondateur et dirigeant de SDTech à Alès (30), entreprise spécialisée dans la micronisation, l'analyse et le traitement à façon des poudres fines et ultrafines pour l'industrie, Jalil Benabdillah, n'est pour autant pas novice en politique, lui qui était élu à la Ville et à l'Agglomération d'Alès avant de lâcher ses mandats pour se lancer aux régionales aux côtés de Carole Delga (PS). L'emblématique entrepreneur alésien a également cédé la présidence de Leader Occitanie, club d'entreprises en croissance. Deux mois après sa nomination, Jalil Benabdillah se confie sur sa feuille de route.

LA TRIBUNE - Votre délégation a été élargie par rapport à ce qu'elle était lors du précédent mandat de Carole Delga, la présidente ayant ajouté l'emploi et la réindustrialisation. Pourquoi et quelle est votre feuille de route ?

JALIL BENABDILLAH - Carole Delga a ajouté l'emploi et la réindustrialisation pour s'adapter à la crise que nous traversons. Et ce sont des indicateurs importants pour les habitants de l'Occitanie. La préoccupation n° 1, c'est l'emploi. Quant au mot réindustrialisation, il a un sens précis : géopolitiquement, c'est important, car on subit une crise de raréfaction et de coût des matières premières... Ma feuille de route, c'est donc la préservation et la création d'emplois, un travail sur le terrain pour trouver des réponses aux problématiques des entreprises et confirmer l'ambition de la présidente de faire de l'Occitanie "la région des solutions". Et la territorialité de l'action de la Région car il faut mailler tous les bassins économiques et pas seulement les métropoles.

Quelles sont les priorités et les premières actions de votre mandat ?

Il faut porter le fer sur la relance avec tous les dispositifs que la Région propose. On peut citer en premier ce qui est une nouveauté : le fonds anti-faillite. Il est doté de 100 millions d'euros. Nous avons volontairement agi vite après les élections en votant ce fonds. Une tranche de 25 millions d'euros sera effective dès cet automne. Il vise 2.000 entreprises régionales, des entreprises qui ont perdu du chiffre d'affaires, qui ont contracté le PGE mais non pas résolu leurs problèmes de fonds propres et qui sont surendettées. Quand il faudra rembourser le PGE et autres, elles n'auront pas de capacité d'emprunt et le recours au fonds anti-faillite viendra protéger l'emploi. Ce dispositif devrait avoir un effet levier de 500 millions d'euros au total. La Région mettra des quasi-fonds propres pour leur permettre à l'entreprise aidée de respirer et de réemprunter pour réaliser des investissements... Globalement, sans faire d'inventaire à la Prévert de tous les dispositifs, on peut dire que la Région a alloué des moyens colossaux pendant la crise sanitaire, aux côtés de l'État et de partenaires comme les chambres de commerce. Parmi les outils d'aide aujourd'hui encore, il y a le fonds souverain régional de 150 millions d'euros qui va viser la réindustrialisation, ou l'Épargne Occitanie pour financer la proximité en permettant aux citoyens d'être actifs dans une entreprise. Il y a du cash disponible qui peut être investi dans l'économie locale de manière utile.

Comment abordez-vous la question des enjeux de la transition digitale et environnementale ?

La numérisation est un enjeu majeur. Certains territoires - mais ce n'est pas du ressort de la Région - et certaines entreprises ont besoin d'accélérer. Je rappelle que nous avons des dispositifs de formation pour faire monter les salariés en compétences, mais aussi des dispositifs de financement de diagnostic et des investissements de transformation digitale... Concernant les démarches de transition écologique, allier économie et écologie, c'était un engagement de campagne de Carole Delga. Nous avons lancé un appel à manifestation d'intérêt pour une expérimentation auprès d'une centaines d'entreprises régionales volontaires qui voudraient prendre un virage vertueux vers une économie plus responsable. On fera un diagnostic avec elles et on regardera ensuite ce qu'on peut faire pour améliorer les pratiques. Une partie des 100 entreprises a été identifiée dans l'Hérault ou le Gard, mais nous souhaitons bien sûr que tous les bassins soient représentés.

Dans l'Aveyron, la fonderie SAM à Decazeville, dédiée à l'industrie automobile, et l'usine Bosch de Rodez sont dans des situations critiques. Que fait la Région ?

Ce sont deux dossiers prioritaires car ce sont des enjeux de territoire et beaucoup de choses dépendent de ces emplois. La Région s'en occupe, évidemment. On est à la manœuvre aux côtés des partenaires, en liaison avec les salariés et dirigeants, et des discussions sont engagées au plus haut niveau. Carole Delga a déjà rencontré Agnès Pannier-Runacher, la ministre déléguée en charge de l'Industrie. Il est cependant trop tôt pour donner des pistes... Des réunions importantes sont encore à venir, il faut laisser les discussions se faire.

Les entreprises de la région comme de toute la France rencontrent d'importants problèmes d'approvisionnement en composants électroniques. La collectivité régionale peut-elle les aider ?

J'ai déjà fait une réunion sur ce sujet. La Région veut aider à différents niveaux : ces petites entreprises ne peuvent pas répondre aux commandes donc elles risquent de perdre des marchés ou de voir certains marchés décalés dans le temps. Cela va donc contribuer à dégrader leur situation financière. Elles ne sont pas éligibles au dispositif de chômage partiel et j'en discuterai avec les services de l'État. On peut aussi imaginer de faire de l'ingénierie pour les accompagner sur les problèmes de trésoreries, regarder s'il y a un travail de filière à mener. On est là sur un problème national, et le rôle de la Région est de le rendre visible auprès des ministères. Carole Delga est aussi Présidente de l'association des Régions de France et elle peut se rapprocher de ses homologues dans les différentes régions pour mutualiser la problématique.

Les entreprises font face à de réelles difficultés de recrutements, notamment dans certains secteurs. Comment la Région peut-elle les aider ?

On est dans le paradoxe français : beaucoup de chômage et des métiers en forte tension, comme dans le tourisme et la restauration. Il faut discuter avec les branches, les filières, les partenaires pour mettre les choses à plat et évoquer l'attractivité de certains métiers et de certains territoires. La Région a mis en place un dispositif de formations courtes et rapides sur les métiers de bouche et le tourisme. Il existe le un Pass RH pour former les salariés des TPE et PME. On met des moyens pour anticiper les besoins, mais c'est difficile d'aller plus loin... Nous allons installer une dizaine d'écoles ETRE (École européenne de la transition écologique, NDLR) dans la région (en juin dernier, Carole Delga avait annoncé la création de la première à Vauvert pour la rentrée 2022, NDLR). Il y a bien sûr aussi les écoles du numérique qui peuvent amener une réponse à la forte tension qui existe sur les métiers de développeurs informatiques par exemple. Je rappelle que la Région a mis en place des solutions de transport gratuites pour les demandeurs d'emploi, et de l'aide à la garde d'enfants. Nous avons engagé toute une batterie d'outils pour répondre à ces problématiques.

L'Occitanie dispose d'une industrie forte côté Toulouse notamment avec Airbus, ou encore sur des bassins comme le bassin alésien, le Gard rhodanien, mais peu du côté de Montpellier notamment. Cette période où on parle souveraineté, relocalisation et réindustrialisation pourrait-elle être une nouvelle chance pour la région ?

L'Occitanie est une terre industrielle ! Et s'il n'y a pas beaucoup d'industries à Montpellier, la métropole a d'autres atouts dans l'innovation, les technologies, la santé et les biotech, les ICC, etc. Il y a probablement de la culture industrielle à injecter sur certains territoires en région. Avec la crise, l'acceptabilité est meilleure, et c'est le moment de réindustrialiser. Nous voulons renforcer les bassins déjà industrialisés mais aussi en doter d'autres en fonction de leurs forces et de leurs atouts, par exemple sur la transformation alimentaire ou le recyclage. Nous sommes dans une région à haut potentiel. Mais oui, il faut renforcer l'existant et aller chercher de nouvelles opportunités.

Vous êtes vous-même un dirigeant d'entreprise. Quel atout cela vous confère-t-il dans votre mission politique ?

C'est indéniablement un atout. Je suis passé par une école d'ingénieur, par le monde de la recherche, et je connais par exemple la problématique d'adéquation de la formation au monde économique. Je sais ce que c'est que créer une entreprise. Je connais les difficultés que peut rencontrer l'entrepreneur, c'est ma vie ! Je connais les partenaires du monde économique... J'ai les mains dans le cambouis ! Ça ne veut pas dire que je sais tout mais je peux comprendre les interlocuteurs économiques. Par mon expérience, je peux être utile à l'écosystème.

Comment s'organise la vie d'un vice-président de la Région Occitanie, également chef d'entreprise justement ?

Tout d'abord, je veux préciser que ce sont des choix, personne ne me l'a imposé. J'ai envie d'être utile au plus grand nombre, avec un focus sur les plus fragiles. Je suis un contributeur à un travail collectif auquel je crois, tout comme je crois à l'intelligence collective. J'ai abandonné certaines charges pour me dégager du temps : tous mes mandats locaux à Alès, ma charge de président de Leader Occitanie, mes engagements à Face Gard, etc. Pour ce qui est de mon entreprise (50 salariés, NDLR), je m'étais déjà organisé quand j'exerçais mes mandats locaux. Mon associé (Aziz Aït Amer, NDLR) et moi avons renforcé l'encadrement, j'ai recruté un DG adjoint avec une grosse expérience et qui est aujourd'hui le bras droit de mon associé. Je garde la décision stratégique et financière. C'est vrai que je vois moins les salariés mais j'ai instauré un petit déjeuner par semaine avec eux. Je ne conduis pas et je travaille dans la voiture durant les trajets. Car en tant que vice-président à l'économie, je dois être présent dans les 13 départements de la région, je m'impose cette responsabilité.

Cécile Chaigneau

9 mn

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