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L'Infiniti Q50 joue les pionnières - Challenges

L'Infiniti Q50 joue les pionnières - Challenges
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Infiniti est à Nissan ce que Lexus est à Toyota : une marque, une gamme et un réseau tout entier dédiés à ravir une part de leur clientèle aux trois spécialistes allemand du premium. Toutefois on ne saurait vous reprocher de n'en avoir jamais entendu parler tant sa diffusion reste confidentielle. Et pas seulement en France. Songez qu'avec 1.295 voitures vendues en Europe de l'Ouest au cours des huit premiers mois de l'année (contre 2.129 l'année précédente), Infiniti se situe en retrait de son compatriote Lexus qui, avec 14.002 voitures écoulées durant la même période fait pourtant à peine mieux que la seule Jaguar XF (13.274 exemplaires selon JATO Dynamics). Un score qui laisse néanmoins l'Anglaise bien loin des 69.899 BMW Série 5 livrées de janvier à août 2013.

Infiniti part donc de loin et c'est bien parce qu'elle n'a rien à perdre qu'elle a décidé de jouer la carte de l'originalité. Originalité esthétique tout d'abord, avec une berline Q50 qui se pare d'une carrosserie aux courbes presque sensuelles. Originalité technique ensuite avec une variante hybride essence électrique Q50 3.5h de 364 chevaux dont la vigueur des accélérations et la vivacité du comportement routier tranchent avec l'image de la berline écolo molle du genou. Le couple instantané de son moteur électrique de 68 ch et le V6 3.5 de 306 ch autorisent des reprises foudroyantes et un 0 à 100 km/h en 5,1 secondes. C'est mieux que l'Infiniti M35h qui figure dans le livre Guinness des records comme le véhicule hybride la plus rapide au monde de 0 à 100 km/h.

Image © Infiniti

La volonté de la Q50 de se démarquer de ses rivales allemandes est moins manifeste chez sa variante Diesel. Il faut dire qu'elle est mue par une mécanique entièrement empruntée à la Mercedes-Benz Classe C, Daimler étant lié à Renault, Nissan et Infiniti dans le cadre d'une coentreprise technique et industrielle. On retrouve donc la sonorité sans charme du 4-cylindres 2.2d de 170 chevaux (2.143 cm3), ainsi qu'une certaine hésitation de la boîte automatique 7 rapports en conduite dynamique.

Technique d'avant-garde à tous les étages

La révolution du "steer-by-wire"

Lorsqu'on ouvre la porte de la nouvelle Infiniti Q50, le regard est immédiatement attiré vers la console centrale et ses deux vastes écrans. Si le premier est antireflet, le second les concentre. Pire, il attire les traces de doigt plus sûrement que la vitrine d'un magasin de jouets au mois de décembre. Normal, il commande l'accès à la quasi-totalité des menus et des fonctions embarquées, tout en maintenant affichée la cartographie sur l'écran supérieur. La lisibilité des informations y gagne ce que la propreté y perd. Soie de nettoyage à portée de main obligatoire !

Navigation, caméras tous azimuts pour vue panoramique 360°, téléphone et applications en ligne, système audio Bose Advanced Staging, régulateur de vitesse intelligent, éclairage intelligent, aide au maintien dans sa voie de circulation, alerte de risque de collision avant et arrière… Les équipements de pointe s'avèrent conformes dans leur nombre comme dans leur richesse aux critères du segment des familiales premium. De sorte que, très vite, l'amateur de conduite concentrera son attention sur le réglage plus singulier des paramètres de l'assistance de direction.

De manière fort classique, ce menu sert à moduler l'effort au volant, l'idée étant que fermeté égale sportivité. Sauf que l'assistance électrohydraulique de l'Infiniti Q50 a tendance à s'amoindrir à mesure que diminue l'allure du véhicule, ce qui lui confère en ville une direction trop lourde et trop collante, dénuée de tout retour. Agaçant.

Mais il y a plus déroutant encore. En option à mille euros (ou bien de série sur la version hybride), l'Infiniti Q50 peut être équipée d'une assistance de direction cette fois purement électrique (et pas électrohydraulique) couplée à une commande électrique baptisée DAS, pour Direct Adaptive Steering.

La première direction "steer-by-wire" au monde

Inédit en grande série, le système DAS a déjà fait beaucoup parler de lui. Sur le papier, il cumule les avantages alors qu'à l'usage, il souffle le chaud et le froid.

L'Infiniti Q50 est le premier modèle de série à disposer d'une direction sans liaison mécanique. Image © Infiniti

Derrière l'appellation Direct Adaptive Steering se cache la première application automobile du principe de commande électrique (dite "by wire" en anglais) que l'avionneur Airbus a généralisé dans les airs. Gare à ne pas confondre : il ne s'agit pas seulement de remplacer le vérin d'assistance hydraulique et son circuit par un moteur électrique (le procédé est aujourd'hui devenu la norme) mais bien de supprimer la liaison mécanique traditionnelle entre le volant et la crémaillère. Une étape nouvelle.

L'Infiniti Q50 joue les pionnières - Challenges

Le DAS comprend un ensemble de capteurs qui renseignent trois calculateurs quant à l'angle et à la vitesse de braquage du volant. Deux moteurs électriques en bout de crémaillère se chargent d'imprimer aux roues l'angle de braquage requis. Intérêt de la formule ? Une irréversibilité absolue qui se traduit par une absence totale d'à-coups dans le volant lorsqu'une roue heurte un obstacle ou bien tombe dans un nid-de-poule. Plus fort que les Citroën d'antan équipées de la fameuse Direction à Rappel Asservi.

La commande électrique offre par ailleurs une liberté nouvelle au constructeur comme au conducteur pour paramétrer le taux d'assistance et le caractère plus ou moins direct de la direction. Avec un peu de temps, le conducteur trouve son bonheur entre les multiples combinaisons de réglages offertes. Comble de l'ironie, la direction DAS parvient de la sorte à offrir une consistance plus convaincante que la direction électrohydraulique conventionnelle : légère en ville, elle s'affermit à mesure qu'augmente l'allure et non pas l'inverse. Tout juste lui reprochera-t-on de priver le conducteur du ressenti de la chaussée qu'on attend d'une berline à tendance sportive.

La direction DAS est paramétrable en tous sens. Mais contrairement à l'expression populaire, l'abondance nuit. Image © LQA — E. Bergerolle

Le tableau s'assombrit lorsque le système d'aide au maintien en ligne ALC (Active Lane Control) est enclenché. Ce dernier s'appuie sur une caméra qui lit les bandes blanches et incite le conducteur à corriger sa trajectoire en durcissant la direction d'un côté ou de l'autre. Si ce système s'avère efficace et salutaire en ligne droite (à défaut d'être agréable), il imprime une résistance dans le volant qui devient carrément gênante sur une route sinueuse. L'ALC perd en effet parfois de vue le marquage au sol et varie de manière imprévisible le degré d'assistance de la direction. Le conducteur n'a alors qu'une hâte : désactiver l'ALC, guère plus convaincant que les systèmes similaires de la concurrence.

La commande électrique recèle un potentiel que la réglementation interdit d'exploiter

La direction à commande électrique recèle un autre atout potentiel qui explique son extraordinaire popularité sous le capot des concept-cars depuis une quinzaine d'années : en supprimant l'encombrante colonne, elle autorise un gain de place et de masse important. De quoi imaginer une reconfiguration totale du poste de conduite.

En pratique toutefois, l'Infiniti Q50 conserve une colonne de direction. Car la redondance de boîtiers électroniques ne suffit pas à satisfaire le législateur qui exige par souci de sécurité le maintien d'une liaison mécanique entre le volant et les roues directrices principales. "Nous avons donc mis au point un système de secours pour le cas, très improbable, d'une défaillance totale", explique Takeshi Kimura qui œuvra six années durant au développement et à la mise au point du DAS. "En cas de panne d'un des calculateurs, les deux autres prennent le relais et un voyant invite le conducteur à passer en concession. Ce n'est qu'en cas de panne électrique totale ou en cas de défaillance des trois calculateurs que le système de secours entre en service. Il est constitué d'un embrayage électromagnétique qui se ferme et solidarise le volant et la colonne. En temps normal, cette dernière est inopérante puisque l'embrayage s'ouvre dès la mise sous contact et que la crémaillère est actionnée directement par ses deux moteurs électriques. La résistance au braquage du volant est simulée par un petit moteur électrique."

Image © Infiniti

En temps normal, le volant de l'Infiniti Q50 n'est plus directement lié à la crémaillère de direction, ce qui permet de faire varier l'angle de braquage des roues indépendamment de la position du volant. Le rapport de démultiplication varie ainsi de 1/9 sous 40 km/h à 1/24,7 sur autoroute. Voilà qui est à la fois plus direct que sur le plus surbaissé des coupés et moins direct que sur un 4x4 au centre de gravité haut perché.

Lorsqu'elle est dotée de la fameuse direction DAS, l'Infiniti Q50 fait montre d'une stabilité parfaite sur autoroute et, à l'inverse, d'une agilité diabolique dans les carrefours et lors des manœuvres de stationnement. Car il suffit de deux tours de volant pour aller de butée en butée lorsqu'elle circule à faible allure. Cet entrain à virer court n'est pas sans rappeler la vivacité de la Renault Laguna dotée du train arrière directeur piloté. A ceci près que le diamètre de braquage de la Nippone ne diminue pas : qu'elle soit dotée ou non d'une direction DAS à démultiplication variable, l'Infiniti Q50 exige toujours entre 11,20 mètres et 11,40 mètres pour négocier un demi-tour (selon la motorisation et la taille des pneumatiques).

Mais il y a plus déroutant encore. La variation du rapport de démultiplication devient problématique dans les enchaînements de virages très serrés, lorsque l'allure du véhicule se rapproche du seuil fatidique des 40 km/h. Souvenez-vous : la direction devient de plus en plus directe à mesure que la vitesse chute, ce qui peut surprendre dans certains cas de figure. Explications.

Jetée un peu vite dans un virage très serré, une Infiniti Q50S Hybride AWD s'inscrit facilement et en ressort dans une posture neutre savoureuse, voire légèrement survireuse si le conducteur remet très tôt les gaz. Appréciable. Les choses se gâtent lorsque le conducteur lève le pied en pleine courbe ou freine en cas de danger imprévu. A mesure que la vitesse chute, la direction devient plus directe : le nez de la voiture est alors subitement aspiré à l'intérieur de la courbe, au point de refermer dangereusement la trajectoire. Déstabilisé, l'arrière amorce alors une belle dérive que l'ESC vient corriger sans ménagement en envoyant le nez pointer cette fois vers l'extérieur du virage. L'amplitude de ces corrections a de quoi surprendre, sinon effrayer le conducteur peu aguerri qui ne s'attend pas à voir la Q50 accentuer d'elle-même le braquage sans que le volant n'ait bougé.

Infiniti Q50S Hybrid (2013)Ce défaut est-il moins sensible sur l'Infiniti Q50S Hybride à deux roues motrices ? Hélas, nous n'avons pas eu le loisir de le vérifier. Toutefois rien ne permet de l'envisager puisque la version propulsion fait peser une part plus importante de sa masse totale sur l'essieu avant. De surcroît, Takeshi Kimura confirme que l'amplitude de variation du rapport de démultiplication de la direction est la même sur toutes les Q50 équipées de la direction DAS.

Dans le même virage négocié à la même vitesse, notre Infiniti Q50 2.2d Diesel dotée d'une direction conventionnelle se contente de dériver progressivement des quatre fers de manière assez neutre. En haussant davantage le ton, elle amorce une pointe de sous-virage que l'ESC transforme en un survirage jouissif. Une belle dérive sous contrôle dont les amateurs de conduite sportive apprécieront le côté spectaculaire.

A en croire Sebastien Buemi, pilote d'essai chez Infiniti Red Bull Racing, les ingénieurs d'Infiniti ont voulu créer avec la Q50S Hybride AWD "une expérience de conduite totalement différente de ce qui existe sur le marché de la berline premium". L'objectif semble atteint. Reste à savoir si le curseur n'a pas été poussé un peu trop loin.

Un rapport prix équipement avantageux, pour percer en Europe

L'Infiniti Q50 se targue d'être "le véhicule le plus personnalisable de sa catégorie avec 96 paramètres répartis sur 10 fonctions". Si sa direction s'avère effectivement paramétrable en tous sens, les lois d'amortissement de sa suspension ne le sont pas. Une économie surprenante à ce niveau de gamme qui se rappelle au bon souvenir du conducteur lorsqu'il aborde une première route sinueuse. Lui et ses passagers aimeraient alors pouvoir troquer une part de la souplesse des ressorts (qui garantit un excellent confort sur autoroute) pour davantage de maintien de caisse. Toutes les Infiniti Q50 chaussent des enveloppes à roulage à plat (runflat), dont on sait que la rigidité des flancs ne favorise pas le filtrage des petites imperfections de la route. De fait, la Q50 s'avère plutôt sèche à basse vitesse sur les raccords de la chaussée, plus encore la variante Q50S AWD Hybride à transmission intégrale du fait de ses grandes roues de 19 pouces. Ce qui n'empêche pas sa suspension de pomper excessivement sur les grandes ondulations, voire même d'arriver en butée en virage serré abordé à vive allure.

L'Infiniti Q50 paie sans doute là le prix de sa masse élevée. Avec 1.901 kg, la version Hybride intégrale pèse 76 kg de plus que la version Hybride propulsion et 246 kg de plus que sa rivale BMW ActiveHybride 3 à deux roues motrices. Laquelle est plus légère de 109 kg que la Q50 Diesel automatique la mieux équipée.

Image © LQA — E. Bergerolle

Comme nous l'avons vu plus haut, cette masse induit parfois des mouvements de caisse parasites et influe sur le confort des passagers. Toutefois l'absence de remontée de couple dans la direction et la répartition soignée des masses entre les essieux (avec une légère prépondérance sur l'arrière afin de souligner l'agilité de la voiture) permet à l'Infiniti Q50 de conserver un comportement dynamique, très typé "propulsion". Sans doute davantage que celui de la BMW Série 3.

Cette dernière fait payer cher ses atouts, on le sait. Une BMW ActiveHybrid 3 de 340 chevaux qui affiche une consommation mixte normalisée de 5,9 l/100 km (139 g/km de CO2 et 0 à 100 km/h en 5,3 s) s'affiche à 54.600 euros. L'Infiniti Q50S Hybride de 364 chevaux démarre à 53.540 euros avec un équipement autrement plus généreux et une consommation normalisée à peine supérieure de 6,2 l/100 km (144 g/km de CO2). Pour 56.040 euros, la Q50S AWD à transmission intégrale permanente prétend à 6,8 l/100 km de moyenne en cycle mixte (159 g/km de CO2). L'une et l'autre disposent sans supplément de la direction DAS et de l'aide au maintien en ligne, ainsi que de la surveillance de la pression des pneus, de l'accès main libre, des sièges électriques, de l'éclairage à diodes. En revanche, elles perdent la possibilité de rabattre le dossier de la banquette et une portion non négligeable de leur coffre (400 litres au lieu de 500 litres, ce qui reste supérieur aux 375 litres d'une BMW ActiveHybrid 5 de catégorie supérieure).

Infiniti est persuadé détenir avec la Q50 une arme de conquête en Europe. La stratégie diffère de celle de Lexus qui, après l'échec relatif de sa berline IS Diesel a choisi de renoncer à ce type de motorisation toujours plus coûteuse à dépolluer pour tout miser sur la double motorisation essence-électrique. L'Infiniti Q50 offre l'alternative et le double luxe de pouvoir compter sur la réputation de Diéséliste de son partenaire Daimler tout en coupant l'herbe sous le pied de BMW avec une hybride plus performante.

En résumé

Infiniti Q50S Hybrid (2013)

De 53.540 euros à 56.40 euros (144 g/km CO2 ou 159 g/km CO2 si transmission intégrale).

Ligne très personnelle, équipement de pointeFinition plutôt flatteuse et excellente insonorisationComportement routier très typé "propulsion", belle agilitéDirection DAS (optionnelle) à la consistance satisfaisanteCoffre de 500 litres (400 litres sur hybride) supérieur aux rivales.
Direction DAS reste perfectible dans sa gestion de la variation du rapport de démultiplicationDirection DAS ne traduit pas le travail des pneumatiquesDirection conventionnelle trop lourde et collante en villePédale de frein difficile à doser en ville (hybride)Image à construire
» Confort3/5
» Prix / Equipements5/5
» Performances5/5
» Consommation5/5
» CO25/5